"Une enquête
multifactorielle de l'Afssa réalisée de 2002
à 2005 dans cinq départements recense les
nombreux problèmes rencontrés par les
insectes.
LES RÉSULTATS de l'enquête
multifactorielle de l'Afssa (Agence française de
sécurité sanitaire des aliments) sur les
troubles des abeilles constatés en France au milieu
des années 1990 ne sont toujours pas sortis. Ils ne
devraient pas être visibles avant longtemps. Le
laboratoire de Sophia-Antipolis attend, en effet, la venue
d'un statisticien pour traiter le monceau de données
accumulées entre 2002 et 2005. Le retard est dû
à des problèmes budgétaires.
Jean-Paul Faucon, chef de l'unité
pathologie de l'abeille de l'Afssa, estime toutefois que ces
données statistiques ne modifieront pas les
conclusions de l'enquête multifactorielle. Ces
dernières ont donc été
rassemblées dans un document de 20 pages qui circule
depuis quelque temps dans les milieux apicoles. Le Figaro a
réussi à se procurer ce texte.
Les conclusions de l'enquête ne
manqueront pas de provoquer des remous car elles ne
recouvrent pas le diagnostic des apiculteurs. Ces derniers
affirmaient - on était alors au milieu des
années 1990 - que les mortalités des colonies
d'abeilles et la baisse de production de miel étaient
dues à deux insecticides : l'Imidaclopride et le
Fipronil. Mélangées à l'enrobage des
semences de tournesol et de maïs, ces deux
molécules, aujourd'hui interdites par le
ministère de l'Agriculture, étaient
commercialisées respectivement sous le nom de
Gaucho et de Régent TS. Ces derniers constituent ce
qu'on appelle des insecticides systémiques (c'est la
plante entière qui exprime la substance
toxique).
Acarien parasite
L'enquête de l'Afssa a
été menée dans cinq départements
(Eure, Gard, Gers, Indre et Yonne). Elle a porté sur
cinq colonies choisies au hasard dans cinq ruchers. Les
colonies ont été visitées quatre fois
dans l'année. La Coordination apicole avait
refusé de participer à cette enquête.
Elle estimait en effet que, pour elle, la seule chose
à faire était d'interdire ces deux produits.
C'est donc dans un contexte très conflictuel que
s'est déroulé ce travail. Jean-Paul Faucon
s'est fait entarter par des apiculteurs, l'accusant de
complicité avec les industriels (Bayer et
BASF).
L'enquête de l'Afssa
révèle notamment que dans les cinq
départements, les différentes «
matrices » (miel, cire, pollen) sont contaminées
à faible dose par les produits phytosanitaires
agricoles (imidaclopride, fipronil, endosulfan,
deltaméthrine, parathion-méthyl et d'autres).
Elles sont contaminées aussi par des résidus
de substances (coumaphos et fluvalinate) utilisées
par les apiculteurs pour lutter contre les maladies
causées par le varroa, un acarien parasite qui a
envahi les ruches du monde entier à partir des
années 1990. Un seul cas de mortalité due
à une toxicité aiguë a été
constaté, les analyses ayant
révélé après coup la
présence d'endosuflan et de fluvalinate dans les
abeilles mortes.
« Nous avons constaté
plusieurs pratiques apicoles inadaptées. Parmi
celles-ci, l'utilisation de produits non homologués
pour le traitement de la varroase », note
l'équipe de l'Afssa. Celle-ci a d'ailleurs
noté au cours des trois ans qu'a duré
l'enquête une amélioration du suivi sanitaire
des abeilles. Une observation à mettre en
parallèle avec le manque de formation de certains
apiculteurs, régulièrement
dénoncé par le SPMF (Syndicat des producteurs
de miel français).
Le dernier volet de l'enquête
concerne le fait que, en raison de l'uniformisation des
paysages agricoles, certaines colonies manquent de
nourriture (de nectar mais surtout du pollen qui apporte les
protéines nécessaires au développement
des jeunes larves). « Les anomalies concernant
l'alimentation des abeilles, qui ont été
suspectées en raison de la situation de certains
ruchers, ont pu avoir des conséquences sur la
santé des colonies », avancent les chercheurs de
l'Afssa. Dans ce contexte de disette de fleurs sauvages,
certains apiculteurs explorent d'ailleurs la
possibilité de nourrir les abeilles grâce
à des jachères fleuries. Une initiative qui en
dit long sur les changements apportés par
l'agriculture intensive. "
En complément :
Rapport
de l'AFSSA en pdf
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